Corps principal de bâtiments : le pavillon

Dame Messages : 339 Date d'inscription : 06/07/2009 Localisation : Patay

Etait-ce le beau temps revenu qui laissait présager un été ensoleillé? Etait-ce l'envie de redécouvrir ce domaine qu'elle aimait tant, et que finalement elle connaissait trop peu, ses obligations l'emmenant trop souvent loin de chez elle? Etait-ce autre chose encore? Elle n'aurait su le dire. Mais, de fait, il n'y avait plus guère de jour où elle ne sortit de sa retraite, chaque occasion lui servant de prétexte.
Elle s'était rendue dans ce qui avait été la demeure de son neveu, afin de s'assurer que Wendy y était confortablement installée. Puis, la veille, elle avait pour la première fois pénétré dans le domaine de Kalwynn, qui s'était récemment installé dans un beau pavillon entouré d'arbres. Mais, pour cette première visite, elle s'était contentée d'aller jusqu'au pigeonnier. Elle était restée un moment dans le parc, regardant cette tour ronde, et se demandant si c'était de là que partaient les pigeons qui, depuis peu, lui apportaient de belles missives... Puis elle était rentrée chez elle.
Mais aujourd'hui, c'était décidé, elle irait jusqu'au pavillon. Il était normal qu'elle vint s'inquiéter de son installation et s'assurer qu'il ne manquait de rien.C'était sans doute un faux prétexte. En réalité, elle souhaitait avoir l'occasion de lui dire que son installation dans le domaine lui faisait plaisir, qu'ainsi elle se sentait moins seule, même si leurs demeures respectives étaient un peu éloignées l'une de l'autre. Enfin, tant de choses qu'elle avait à lui dire...
Elle arriva à la porte, un peu essoufflée car elle s'était hâtée, inconsciemment, et resta un instant immobile, le temps de reprendre souffle. Puis elle frappa à la porte, et attendit qu'on vint lui ouvrir.

Soldat Messages : 128 Date d'inscription : 18/12/2011 Localisation : Vannes

En bottes et culottes de cavalerie usées, torse nu, Kal travaillait au jardin, à l’arrière du pavillon qu’il occupait maintenant depuis quelques semaines, après avoir quitté -sans la revendre pour le moment- sa demeure Giennoise.

S’il avait choisi à dessein un coin particulièrement arboré (et assez reculé) du parc, cela nécessitait de la part du Faucon un travail quasi quotidien de remise en état des bâtiments, sur lesquels la végétation avait repris quelques droits depuis des années.

Kalwynn préférait la nature un peu sauvage aux sages ordonnancements d’un jardin à la française, néanmoins il paraissait nécessaire que les abords immédiats de sa demeure ne gardent pas l’apparence d’une jungle miniature.

Entre deux coups de serpette, il crut entendre toquer à la porte. Le borgne se redressa, s’essuyant le front de l’avant-bras… son cœur bondit dans sa poitrine. Se pourrait-il qu’il reçoive une visite de la personne qui occupait toutes ses pensées depuis des mois ?

Lâchant ses outils, il entra dans la salon qu’il traversa, et réalisa au moment d’ouvrir la porte qu’il arborait là une tenue bien peu convenable. Revenant d’un pas en arrière, il décrocha à la patère une ancienne chemise de l’Ost, qu’il enfila vivement.

Puis il s’assura que son bandeau couvrait bien sa blessure, et ouvrit la porte assez vivement.

Sur le palier se tenait une Joshin aux joues délicatement rougissantes, apparemment essoufflée.

Très chère Joshin, quelle plaisir de vous voir !

Kal s’inclina doucement, tâchant de dissimuler un léger trouble, et le grand sourire qui s’élargissait sur sa figure…

Dame Messages : 339 Date d'inscription : 06/07/2009 Localisation : Patay

On tardait à venir lui ouvrir. Peut-être était-il absent. C'était folie, aussi, de se présenter ainsi, sans prévenir... Au moment où toutes ces pensées se bousculaient dans sa tête, brusquement la porte s'ouvrit:

- Très chère Joshin, quelle plaisir de vous voir !

Elle ne put s'empêcher de sourire. A l'évidence, si elle en jugeait d'après sa tenue quelque peu disparate, elle le surprenait en plein travail.

- Je suis désolée d'arriver ainsi, j'aurais dû vous faire prévenir de ma visite. Je vous dérange sans doute... N'hésitez pas à me le dire, je reviendrai une autre fois, si vous le souhaitez...

Elle se tenait hésitante, ne sachant si elle devait s'avancer ou rebrousser chemin.

Soldat Messages : 128 Date d'inscription : 18/12/2011 Localisation : Vannes

Joshin sourit... merveilleux sourire.

joshin a écrit:: - Je suis désolée d'arriver ainsi, j'aurais dû vous faire prévenir de ma visite. Je vous dérange sans doute... N'hésitez pas à me le dire, je reviendrai une autre fois, si vous le souhaitez...

Kalwynn s'inclina. Attrapa une main fine sur laquelle il déposa un léger baise-main.
Et releva le regard.

Non pas. Vous êtes toujours ici la bienvenue. Excusez ma tenue je vous prie, je jardinais...
Mais peut-être aimeriez-vous voir ce que j'essaie de faire de ces bâtiments ?..

S'écartant, le borgne invita Joshin à entrer.

Dame Messages : 339 Date d'inscription : 06/07/2009 Localisation : Patay

Un baise-main léger, auquel elle n'était pas habituée de la part de ce soldat, une invitation courtoise à entrer...La jeune femme franchit le seuil de cette demeure qu'elle allait découvrir, se demandant s'il fallait y voir le signe d'autres découvertes.

- Merci de votre accueil, et merci aussi de me laisser penser que je ne vous dérange pas. Et il est vrai que je suis fort curieuse de savoir ce que vous allez faire de cette demeure qui est restée inhabitée depuis trop longtemps. Laissez-moi vous dire, au moment où j'y entre pour la première fois, combien je suis heureuse de vous y savoir installé, et je souhaite de tout mon coeur que vous vous y plaisiez et que vous y viviez des jours heureux Ce sera mon souhait de bienvenue, si je puis dire.

Soldat Messages : 128 Date d'inscription : 18/12/2011 Localisation : Vannes

Refermant la porte derrière Joshin, le Giennois se félicita d’avoir toujours été un brin maniaque : la longue pièce principale était propre et ordonnée, bien qu’encombrée par de nombreux souvenirs de voyages.

Livres, coquillages, pierres insolites, masques, peintures et autres armes de prestige ou récupérées pour l’anecdote ornaient les murs, les meubles et le rebord de la cheminée. Tout avait été ramené de sa demeure Giennoise de la rue des Artistes… peut-être faudrait-il un jour vendre cette dernière et définitivement déménager.

Les portes et fenêtres donnant au sud, sur le parc, étaient grandes ouvertes. Le soleil entrait à flots dans le salon. Néanmoins, il restait du travail : les poutres et boiseries notamment requéraient de l’attention, tout comme les murs passés à la chaux dont certains montraient d’anciennes traces d’infiltration d’eau. Cependant, la demeure lui avait parue saine, c’était bien là le plus important.

Chère Joshin, souhaitez-vous poursuivre la visite de ma modeste installation, ou bien vous asseoir avec moi dans le salon ou sur la terrasse ?
Je ne vous remercierai jamais assez de me laisser profiter de ces magnifiques arpents boisés du domaine, et des bâtiments qui s’y trouvent.
Peut-être êtes-vous passée non loin du pigeonnier, il se trouve que je le remets lui aussi en état de marche, ces temps-ci…

Souriant dans sa moustache, Kal adressa à son hôte un regard innocent.

Dame Messages : 339 Date d'inscription : 06/07/2009 Localisation : Patay

Elle entra dans la grande pièce ensoleillée, et s'arrêta, quelque peu interdite: elle n'était pas habituée à une telle profusion d'objets différents, parfois curieux, et se promit de lui en demander plus avant la provenance, si elle en avait l'occasion.

- Voulez-vous bien me faire faire le tour du propriétaire? J'avoue que je suis curieuse de voir ce que vous avez fait de cette vieille demeure, et si j'en juge par les résultats obtenus ici, je suis certaine que ce sera très agréable. Nous pourrons ensuite bavarder à loisir...

Elle lui sourit d'un air un peu espiègle:

- Ne me remerciez pas, vous êtes ici chez vous. Presque plus que moi, dirais-je, puisque je ne suis pas une de Riveroy de naissance, même si j'ai grand plaisir à être la Dame de ce domaine que j'aime beaucoup. Lui redonner vie, après les deuils qui ont frappé cette malheureuse famille, voilà bien un défi que je n'aurais su relever seule.

Elle se demanda un court instant s'il avait pu l'apercevoir, la veille, contemplant le pigeonnier, et décida de faire comme si elle n'avait pas entendu sa question. Elle aurait sans doute l'occasion de lui répondre, si leur visite les amenait jusqu'au pigeonnier.

Soldat Messages : 128 Date d'inscription : 18/12/2011 Localisation : Vannes

Dans un geste théâtral, Kal invita Joshin à la suivre à travers la demeure. Bien que de construction imposante, cette dernière se parcourait rapidement, proposant une enfilade de pièces au rez-de-chaussée. Dans l’une d’elle, la plus à l’ouest, le Giennois avait installé sa chambre. On y accédait depuis une petite antichambre où se trouvaient entreposés quelques instruments de musique, ou directement par l’extérieur.

Là encore, il y avait quantité de petits bibelots, ceux qui avaient été écartés du salon en raison d’un format plus modeste. Le mobilier rappelait celui d’une cabine de navire. Le lit étroit, impeccablement fait, était celui d’un célibataire. Par les petites fenêtres, on voyait la forêt s’agiter dans l’air ensoleillé, le vent chassant de minuscules boules de pollen.

Kalwynn guida son invitée vers la porte qui donnait de la chambre sur le pré. Un chemin gravillonné passait là, qui remontait vers la maison puis bien au-delà, en direction du pigeonnier. Dans l’autre direction, on voyait couler loin en contrebas le petit ruisseau qui traversait le domaine.

Alors qu’ils marchaient, Kal offrit son bras à dame Joshin.

Voyez-vous, chère Joshin, je pensais installer mes appartement plutôt à l’étage, mais la toiture ne me semble pas encore tout à fait digne de confiance, et elle est si haute que je soupçonne quelques bestioles d’être encore mes colocataires… pour tout dire ça ne m’ennuie pas vraiment. L’étage cependant offre une jolie vue sur une bonne partie du domaine, puisque l’on aperçoit même les flèches du châtelet familial pointer au-dessus des arbres…

Un pollen se déposa doucement sur le bout du nez de Joshin. Le borgne le considéra d’un air un rien comique, ne sachant trop que faire... puis il délogea l’intrus d’une furtive caresse, et celui-ci reprit son envol.

Dame Messages : 339 Date d'inscription : 06/07/2009 Localisation : Patay

Il la guida pour la visite du pavillon, et elle fut surprise de voir des instruments de musique dans l'antichambre. Lorsqu'elle le connaîtrait mieux, elle l'interrogerait à ce sujet. Elle le savait poète, bien sûr, il l'avait amplement montré à la caserne, mais elle ne se souvenait pas de l'avoir jamais entendu jouer de la musique.

Ils traversèrent la chambre, sortirent directement dans le chemin qui semblait traverser le domaine. Elle n'avait aucune chambre ouvrant ainsi sur l'extérieur, et elle pensa que ce devait être bien agréable, par les beaux matins d'été, de laisser entrer le soleil et les senteurs du jardin, tout en se demandant s'il n'y avait aucun risque qu'un petit animal n'en profite également. Puis elle se morigéna, intérieurement: ce n'était pas sa chambre, qu'avait-elle besoin de se poser tant de questions?

D'une manière toute naturelle, Kalwynn lui offrit son bras, qu'elle accepta aussi naturellement. Il lui expliqua ses projets, ses craintes quant à la toiture, son plaisir à avoir une belle vue depuis ses appartements, et elle écoutait en silence, l'encourageant d'un sourire parfois, heureuse de voir qu'il semblait décidé à faire du domaine sa demeure principale.

Elle sentit comme une gêne sur le bout de son nez, mais sans qu'elle eut seulement pu esquisser le moindre mouvement, Kalwynn chassa l'intrus, d'un geste si plein de douceur qu'elle en rougit.

- Qu'était-ce donc? Un insecte? Je n'ai pas vraiment eu le temps de me rendre compte...

Elle aurait pu à tout le moins le remercier, elle n'osa pas, et rougit de plus belle.

Soldat Messages : 128 Date d'inscription : 18/12/2011 Localisation : Vannes

Les joues de son invitée s'empourprèrent lorsqu'il chassa le grain de pollen.
Kal espérait ne pas s'être montré inconvenant.

joshin a écrit:: Qu'était-ce donc? Un insecte? Je n'ai pas vraiment eu le temps de me rendre compte...

Le Giennois haussa le sourcil, l'ombre d'un sourire sur les lèvres.

Nul insecte, ma dame. Rien qu'une sorte de petite fleur.
Et j'imagine qu'une fleur qui se pose sur une autre fleur, ce n'est pas gênant...

Néanmoins, j'aurais craint qu'elle ne vous fasse éternuer...

Le sourire du borgne prit forme. Un peu gêné, un rien désarmant.
Il remarqua qu'ils s'étaient arrêtés... au-dessus de leur tête, les cerises commençaient à colorer leurs branches.
Comme se coloraient encore un peu plus les joues de Joshin.

Kal donna de nouveau le bras à son hôte, et ils reprirent leur promenade.
Il gardait le silence. Peut-être souhaiterait-elle le questionner... et il vivait seul depuis si longtemps qu'il craignait d'être pris pour un moulin à paroles.

Dame Messages : 339 Date d'inscription : 06/07/2009 Localisation : Patay

Comment se pouvait-il qu'elle rougisse encore comme une jouvencelle effarouchée par le moindre compliment? Etait-elle devenue sensible à ce point? Son temps de veuvage et de solitude lui avait-il fait retrouver sa timidité originelle? Quoiqu'il en soit, elle rougissait, et s'en voulait. Et plus elle s'en voulait, plus elle rougissait...
Après un léger arrêt, ils reprirent leur promenade. Kalwynn restait silencieux, elle-même était quelque peu perdue dans ses pensées. Puis après quelques pas, elle leva les yeux sur lui:

- Je me rends compte de ce que je vous connais bien peu, en définitive. Nous nous croisons souvent à la caserne, nous faisons partie de la même famille, ou plus exactement je suis entrée dans votre famille, et pourtant je ne sais rien de vous, ou presque. Juste ce que vous nous avez dit de vos parents, de votre mère surtout. Mais vous n'avez jamais rien dit sur votre vie personnelle. Est-ce indiscret d'aborder ce sujet?

Elle aurait voulu savoir tant de choses sur lui! Sur sa vie, ses goûts, ses amitiés, ses amours aussi, peut-être... Tant de choses à découvrir, en somme.

Soldat Messages : 128 Date d'inscription : 18/12/2011 Localisation : Vannes

Le borgne serra un peu plus contre lui le bras de son hôte, et sourit doucement en entendant sa question… Après avoir imperceptiblement haussé les épaules, il lui répondit, les yeux fixés sur la lisière toute proche.

Chère Joshin, je suis plutôt enclin à dire que c’est moi qui suis entré dans la vie des Riveroy ! Et peut-être de manière un peu brutale.

Que vous dire ainsi, alors que nous nous promenons, que vous ne sachiez déjà…
Peut-être devinez-vous que je suis un rien secret [sourire] et que je n’aime guère parler de moi.
Mais je vais essayer de rendre ce récit vivant, à défaut qu’il soit fort intéressant !

Rien de très exotique je le crains, dans mes origines, puisque je suis né dans notre bon Duché.
Je n’ai pas connu mon père, qui est mort quelques semaines après ma naissance. J’admirais beaucoup ma mère mais j’ai dû quitter notre maison à l’adolescence car son nouvel époux ne m’acceptait pas… et c’est un doux euphémisme !

Très attiré depuis longtemps par notre fleuve et nos rivières, j’ai trouvé du travail sur des gabares, puis sur des bateaux de pêche en mer et enfin des navires…
Avez-vous jamais vu l’océan, chère Joshin ?
Ce fut comme une révélation pour moi, et parfois je souffre d’être éloigné de la mer.

J’ai beaucoup aimé ces années, elles furent émaillées de nombreuses petites aventures ou anecdotes, le plus souvent heureuses, mais parfois bien sombres.

Car, dit-on, « Aristote pardonne toujours, l’homme parfois, la mer jamais ».

Peut-être est-ce là une des raisons à quelques unes de mes déconvenues.
Car je dois avouer que j’ai mené sur certains de ces navires des missions et quêtes aux objectifs bien peu louables…
Voilà pourquoi notre cher Octo n’eut pas tout à m’apprendre du maniement de l’épée lors de mon arrivée au sein de l’Ost.

Rassurez-vous toutefois, je n’ai pas tranché trop de gorges pour m’approprier les quelques breloques qui encombrent aujourd’hui votre pavillon du parc…

Kalwynn fit silence quelques instants. C’était là une pointe d’humour mais il doutait que Joshin soit friande des récits de sa sanguinolente jeunesse maritime.

Cette vie ne pouvait durer. J’ai souhaité un jour, et en une occasion que je vous raconterai peut-être, me tourner vers la lumière d’Aristote, ranger le sabre et fonder une famille.

C’est donc en Orléans que je suis revenu. Et pour être certain d’employer mon épée à une cause juste -s’il fallait de nouveau l’employer- j’ai essayé de rejoindre l’Ost dès mon arrivée.

Hélas, en parallèle, mon caractère farouche et un rien ombrageux de marin ne m’a guère servi à m’attirer les sympathies de mes concitoyens alors que je m’installais à Gien. Et leur revendication « rebelle » me parut parfois dérisoire, alors que j’avais vu les pires forbans s’étriper sur les ponts de vaisseaux en plein naufrage !..

Le borgne se rendit compte qu’il s’était bien exalté au cours du récit, gesticulant du bras auquel ne s’accrochait pas dame Joshin. Il revint à un débit plus modéré.

Bref, hormis vis-à-vis de Xalta, Dessan et quelques autres, j’eus bien du mal à m’intégrer. Mais j’en assume une bonne part de la responsabilité.
Et même si l’on me taquinait parfois en me soutenant le contraire, je n’avais guère l’impression de plaire aux femmes.
Mon espoir de rencontrer quelqu’un et de fonder une famille tourna court, puisqu’il m’arriva seulement de fréquenter deux jeunes femmes. La première me quitta en raison de caractères trop différents, et des exigences de mon engagement dans l’Ost… la seconde parce que sa famille l’avait promise à un autre.

Je terminerai donc sur le meilleur. L’Ost m’a accueilli et j’y ai rencontré autant des frères d’armes que des gens de qualité, notamment dame Kalimalice et feu votre époux, qui se proposèrent pour m’accompagner dans ma démarche de baptême.
En deux ans, j’ai escaladé la hiérarchie de notre armée, parfois surpris que l’on m’honore à ce point, jusqu’à devenir votre second.
Jadis peu sensible à tout ceci, je vis nous quitter avec une grande émotion beaucoup de nos camarades : Arfast bien sûr, mon complice Dessan, Atol, mais également Mr pantin qui fut blessé également que je perdis cet oeil, Lissandril… la liste est bien longue.

Et enfin j’ai découvert, à la lecture d’une lettre posthume de ma mère, mon lien avec les Riveroy, me trouvant donc du jour au lendemain un nom que je porte maintenant avec une grande fierté, et une famille que je chéris… même si je voudrais bien qu’elle s’étoffe…

De sa main libre et alors qu’ils marchaient, Kalwynn caressa doucement du bout des doigts la main de Joshin qui reposait au creux de son bras.

Voilà, chère Joshin, un petit aperçu « à brûle-pourpoint ».

Dame Messages : 339 Date d'inscription : 06/07/2009 Localisation : Patay

Joshin écoutait, silencieuse. Lors de son entrée dans la famille Riveroy, Kalwynn avait parlé assez brièvement de sa famille, et des motifs de son éloignement d'Orléans.
Maintenant, il s'ouvrait un peu plus, et elle l'écoutait lui conter une vie aventureuse et qui n'avait sans doute pas été exempte de dangers. Elle comprenait mieux à présent certaines choses, et ne se questionnait plus sur la provenance de quelques objets remarqués lors de sa visite.
Peu à peu, leurs pas s'étaient ralentis, dans le même temps que Kalwynn serrait un peu plus son bras. Lorsqu'il termina de parler, un peu comme si celà allait de soi, sa main libre vint caresser la main de Joshin, posée au creux de son bras. Elle ne la retira pas, essayant de ne pas tressaillir et ne voulant pas montrer combien ce simple geste pouvait la toucher.

- Vous me racontez là une vie bien mouvementée, mon cher Kalwynn, et le peu d'aventures que vous rencontrez maintenant à l'Ost doit vous sembler fort monotone.

Elle se permit un sourire, qu'elle voulut léger:

- Gien est une ville que je n'ai jamais beaucoup appréciée, ou, pour mieux dire, où je ne me suis jamais sentie à l'aise chaque fois que j'y suis passée, au contraire de Patay où je vis depuis assez longtemps maintenant pour presque en venir à penser que c'est mon véritable chez moi. Même si ma terre natale est bien loin d'ici, près d'une mer en apparence plus calme que votre océan impétueux.

Une ombre voila son regard, souvenirs heureux d'un temps à jamais révolu, regret poignant de penser que peut-être elle ne reverrait plus jamais, maintenant, ce qui avait tant compté pour elle... puis elle essaya de chasser ces pensées et reprit:

- Je vous sais gré de m'avoir confié tout celà, car en effet vous parlez bien peu de vous et je suis heureuse de mieux connaître, même imparfaitement, ce qu'a été votre vie jusqu'ici.
Vous avez trouvé une famille, à défaut d'en fonder une, et s'il est vrai que son histoire a été émaillée de bien des drames, elle est honorable. Feu mon époux, son frère et leur neveu avaient de grandes ambitions pour elle, peut-être pourrez-vous reprendre à votre compte leurs projets, à condition d'en avoir le temps et l'envie, bien sûr.

Elle leva les yeux vers lui, attendant sa réponse.

Soldat Messages : 128 Date d'inscription : 18/12/2011 Localisation : Vannes

La promenade se poursuivait, fort agréable, dans le grand parc boisé du domaine Riveroy.
Et au monologue de Kalwynn succédait une véritable conversation, ce qui enchanta le borgne... même si Joshin frissonna légèrement quand il lui prit le bout des doigts. L'ancien Giennois ne voulait pas paraître trop entreprenant.

joshin a écrit:: - Vous me racontez là une vie bien mouvementée, mon cher Kalwynn, et le peu d'aventures que vous rencontrez maintenant à l'Ost doit vous sembler fort monotone.
- Gien est une ville que je n'ai jamais beaucoup appréciée, ou, pour mieux dire, où je ne me suis jamais sentie à l'aise chaque fois que j'y suis passée, au contraire de Patay où je vis depuis assez longtemps maintenant pour presque en venir à penser que c'est mon véritable chez moi. Même si ma terre natale est bien loin d'ici, près d'une mer en apparence plus calme que votre océan impétueux.
- Je vous sais gré de m'avoir confié tout celà, car en effet vous parlez bien peu de vous et je suis heureuse de mieux connaître, même imparfaitement, ce qu'a été votre vie jusqu'ici.
Vous avez trouvé une famille, à défaut d'en fonder une, et s'il est vrai que son histoire a été émaillée de bien des drames, elle est honorable. Feu mon époux, son frère et leur neveu avaient de grandes ambitions pour elle, peut-être pourrez-vous reprendre à votre compte leurs projets, à condition d'en avoir le temps et l'envie, bien sûr

Le borgne secoua la tête, mi-amusé mi attristé, montrant le bandeau qui lui recouvrait l'oeil.

Croyez-moi chère Joshin, les aventures de l'Ost me suffisent grandement...

Ne parlons plus de Gien, si vous voulez bien... en revanche je voudrais savoir d'où vous venez, et quelle est cette région côtière que vous évoquez. Si cela ne vous ennuie pas bien sûr !

Son invitée levait la tête vers lui, le dévisageant. Ce fut au tour de Kal d'être troublé...

Je suis fier de notre famille, autant que peut l'être un membre "récent" comme moi.
J'aurais à coeur de retravailler aux projets de mon parrain ou d'Atol... si bien sûr je puis faire quelquechose.
Car je me dois d'avouer que je ne suis guère lettré, et aucunement instruit en mathématiques.
Je crains de n'être guère habile pour le négoce, et pis encore pour la tenue des livres de comptes !

L'officier se mit à rire de bon coeur.

Dame Messages : 339 Date d'inscription : 06/07/2009 Localisation : Patay

Le rire de Kalwynn apporta un peu de légèreté à la conversation, qui par moments devenait bien sérieuse. Au moment où il avait évoqué la blessure qui l'avait privé d'un oeil, elle avait été sur le point, instinctivement, de caresser d'un doigt léger le bandeau qu'il portait en permanence. Heureusement, elle s'était arrêtée à temps, mais elle en demeura un peu interdite, et presque honteuse.

- Vous me surprenez grandement, en disant n'être point doué pour le négoce, car il semble bien que ce soit un signe distinctif de la famille Riveroy. Arfast et son frère étaient fort habiles pour le commerce, et disaient tenir cette facilité de leurs lointains ancêtres, qui sont aussi les vôtres. Mais il est vrai qu'ils me laissaient volontiers m'occuper des écus de la famille, tout au moins pendant tout le temps où nous avions imaginé de fonder une banque. Peut-être, tout simplement, n'avez-vous pas eu l'occasion de vous y intéresser suffisamment?

Elle n'attendit pas sa réponse, craignant qu'une nouvelle fois il ne se dévalorise, et reprit:

- Vous m'avez demandé d'où je venais, et il est vrai que je n'en parle guère, au point que bien des personnes de ma connaissance semblent penser que je suis née à Patay. En réalité, je suis née bien loin d'ici, de l'autre côté des Pyrénées, dans une Principauté que l'on nomme Catalogne, et j'y ai vécu au bord de la Mer Méditerranée, cette mer que j'ai retrouvée par la suite au cours de la campagne de Provence, en particulier.

Une sorte de pudeur l'empêcha, à ce moment-là, d'évoquer le long voyage de noces au cours duquel son mari l'avait emmenée revoir sa terre natale. Non qu'elle voulut lui cacher quoi que ce soit, mais le moment n'en était pas venu, lui semblait-il, et elle craignait de le lasser en lui parlant trop d'elle.

- Mon père avait entendu dire que le Royaume de France était un paradis sur terre, et il décida de venir s'y installer avec ma mère et moi. Malheureusement, rien n'était comme il le supposait... Un mauvais refroidissement eut raison de lui, près de Bordeaux, et ma mère en mourut de chagrin. Je repris la route, seule, pour finalement m'arrêter à Patay. Le reste de ma vie, je pense que vous le connaissez.

L'après-midi s'écoulait lentement, au rythme de leur promenade, comme si le temps s'arrêtait un peu pour leur permettre de mieux profiter de ce moment où ils faisaient, en somme, connaissance.

Soldat Messages : 128 Date d'inscription : 18/12/2011 Localisation : Vannes

Kal n'interrompit pas Joshin quand elle évoqua le talent des hommes de la famille pour le négoce. Il aimait entendre parler de son parrain qu'il avait finalement bien peu connu. Il se souvenait du jeune Faucon qu'il avait été, harcelant parfois le digne capitaine royal de messages dans lesquels il confiait ses idées au maître de l'Ost. Deux années en arrière... et tant de choses changées.

Pour les mathématiques et les écus, le borgne se contenta de sourire de nouveau. La simple idée de colonnes de chiffres sur un parchemin suffisait presque à lui donner la migraine !

Il tendit l'oreille, et resserra légèrement l'étreinte de ses doigts quand son invitée évoqua ses origines et sa "première" famille.
Il eut l'idée et l'envie de lui proposer de l'emmener sur les terres de ses racines, mais devina au ton de Joshin qu'un homme avait déjà initié ce projet. Pudique, il ne posa pas de questions.
Le Giennois se sentait parfois bien minable, de courtiser une femme qui avait dû connaître des hommes si sages et brillants.

Chère Joshin, je vous situe un peu mieux maintenant. Je saurais placer la Méditerranée sur une carte, bien que curieusement je n'ai pas navigué dans ses eaux.

Le couple passa non loin d'un joli banc de pierre blanche, installé sous un marronnier.

Souhaitez-vous que nous fassions une pause en nous asseyant quelques instants à l'ombre ?

De sa manche, Kal frotouilla le banc pour permettre à Joshin de s'y installer.

Dame Messages : 339 Date d'inscription : 06/07/2009 Localisation : Patay

Arrivés près d'un banc , Kalwynn lui proposa de se reposer un peu à l'ombre, et n'hésita pas à salir sa manche afin de nettoyer un peu le banc pour elle. Elle était touchée de ces petites attentions, qui lui montraient à l'évidence qu'il se souciait de son confort.
Ils prirent place sur le banc, et elle reprit la conversation:

- J'espère qu'un jour vous aurez l'occasion de connaître la Méditerranée. Elle ne ressemble en rien aux Océans que vous avez sans doute parcourus, mais elle a son charme, avec ses eaux bien plus tranquilles, chatoyantes et limpides comme le cristal.

Elle leva les yeux sur lui et continua en souriant:

- Savez-vous que l'on m'a proposé il y a peu de faire un long voyage? Des amis de Patay envisagent de partir pour un long périple qui les emmènera jusqu'au fin fond de l'Andalousie, bien plus loin que ma Catalogne natale, et m'ont demandé de les accompagner. Mais pour l'instant, celà n'est pas envisageable, bien entendu, ou alors il me faudrait quitter l'Ost. Et pour l'instant, ce n'est pas envisageable. Vous savez combien j'y suis attachée, et combien je considère cette caserne comme une seconde maison.
Mais qui peut savoir de quoi l'avenir est fait? Les choses changent parfois de façon si rapide, et si peu prévisible...

Elle parlait d'une voix douce, ne voulant pas troubler la quiétude du moment.

Soldat Messages : 128 Date d'inscription : 18/12/2011 Localisation : Vannes

Joshin parlait d’une voix douce, qui en certaines notes s’harmonisait parfaitement avec le délicat souffle de vent qui agitait les feuilles au-dessus de leur tête.

Comme la mer dont elle parlait, leur proximité lui avait semblé fluctuante au cours de la promenade. Parfois proches, avec un rien de complicité, comme lorsqu’il avait chassé du nez de Joshin un pollen, parfois distants du fait de leur histoire, de leur vécu… le chagrin durable et bien compréhensible de l’une, l’amertume solitaire de l’autre.
Etait-ce là des maux qu’un baume pourrait apaiser, à défaut de guérir ?

Il était inhabituel qu’une femme le trouble ainsi.

Chère Joshin, j’aurais à cœur de voir votre Méditerranée, si l’occasion m’en est donnée.
Vous savez, je n’ai jamais fait de mystère à ce sujet : s’il n’y avait eu l’Ost, j’aurais quitté notre Duché depuis longtemps, une fois que j’ai réalisé que les rêves que je poursuivais ne verraient pas leur concrétisation à Gien.

Cependant, c’est ici et par hasard que j’ai pu découvrir mon appartenance à notre famille bien-aimée, alors on peut dire que j’ai trouvé déjà bien des joies grâce à notre armée.

Effectivement, je serais bien triste de vous voir quitter subitement l’Ost pour aller vivre ce long voyage…

Un sourire étira le visage bronzé du borgne.

… à moins que vous ne m’emmeniez dans votre bagage !
Cela dit, je suis un peu encombrant, et même si je considère que nul n’est indispensable, je doute que notre départ cumulé fasse grand bien à notre Ost.

Et qui sait, peut-être avons-nous d’abord quelques jolies choses à vivre ici…

Kal s’empara délicatement des mains de Joshin, ancrant son regard dans les yeux de son hôte.

Dame Messages : 339 Date d'inscription : 06/07/2009 Localisation : Patay

Elle fut saisie lorsqu'il évoqua la possibilité de partir avec elle. Des sentiments contradictoires l'agitaient, qu'elle avait quelque peine à bien comprendre toutefois.
Le voyage dont on lui avait parlé serait le même,à peu de chose près, et tout au moins dans sa première partie, que celui qu'elle avait fait avec son mari. Elle ne ferait pas l'injure à Kalwynn de l'emmener sur ces mêmes chemins, mais, bien sûr, il ne pouvait le savoir lorsqu'il lui avait demandé, sur un ton badin, de le prendre dans ses bagages.
En même temps, elle ressentait une légère euphorie à l'idée de partir avec lui à l'aventure, et s'imaginait déjà laissant les responsabilités et les charges loin derrière elle... Elle soupira doucement, sachant bien que c'était un voeu irréalisable, pour bien des raisons, dont la première n'était peut-être pas leurs postes à l'Ost. Elle lui faisait entièrement confiance, se sentait bien auprès de lui, même si elle n'osait parfois pas se l'avouer, mais elle savait bien qu'il leur fallait encore se connaître davantage, et s'apprivoiser, en quelque sorte.
Il prit ses mains dans les siennes, et la regarda intensément. Elle lui sourit:

- Je suis heureuse de vous savoir attaché à l'Ost, et à votre famille, pour qui vous êtes important, vous le savez sans doute.
Je ne pense pas donner de suite favorable, pour le moment, au voyage dont on m'a parlé. Ce serait pour moi difficile d'être éloignée si longtemps de tous ceux qui me sont chers.
Mais qui sait? Je vous rappellerai peut-être un jour votre proposition de m'accompagner si je décidais de prendre la route, pour une destination encore inconnue.
En attendant, et comme vous le dites si bien, sans doute peut-il y avoir ici et maintenant quelques belles choses à vivre...

Elle s'arrêta net, se rendant compte que spontanément elle avait failli ajouter "ensemble". Quelle audace de sa part, et quelle vanité que de croire celà! Elle se sentit un peu honteuse, essayant de n'en rien laisser paraître.
Tout était paisible autour d'eux. Elle lui avait abandonné ses mains, qu'elle ne retira pas lorsqu'elle eut fini de parler. Dans la masse de sensations qu'elle ressentait, un sentiment se détachait: elle se plaisait en sa compagnie.

Soldat Messages : 128 Date d'inscription : 18/12/2011 Localisation : Vannes

Kalwynn fut heureux d'apprendre qu'il comptait pour la famille... même si celle-ci comptait maintenant elle-même ses membres sur les doigts d'une main.

Il sourit quand Joshin évoqua la possibilité de lui remémorer un jour sa proposition de voyage...

Ma mémoire défaille parfois... peut-être est-ce parce que l'on ma donné trop de coups sur la tête !
Mais je n'oublierai pas cette conversation, ni rien vous concernant, chère Joshin.

Tenant toujours les mains de Joshin -ô joie ! elle ne les avait pas retirées !- Kal attira doucement son hôte contre lui. Il voulait lui offrir, si elle le souhaitait, le chaste abri de ses bras ou de son épaule, pendant les quelques instants privilégiés qu'ils partagaient sous les frondaisons des tilleuls.

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Il lui répondit assez brièvement, et elle se demanda s'il avait bien compris qu'elle ne partirait pas. Oui, sans doute, puisqu'il assurait ne rien oublier de ce qui la concernait. Il est vrai qu'elle lui avait confié bien des choses, au cours de cette promenade.
D'un mouvement très lent et très doux, il l'attira un peu vers elle, et elle n'opposa pas de résistance, à sa grande surprise. Le geste semblait tout naturel, et n'avait rien qui put l'offusquer. Tout aussi naturellement, elle s'appuya contre lui, et le regarda. Personne, et elle moins que quiconque, n'aurait pu, à cet instant, prédire l'avenir: mais le présent était rassurant, et doux.

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Très doucement, Joshin vint se blottir dans les bras de Kal, et il restèrent ainsi, silencieux, à écouter le vent jouer dans les branches des tilleuls. Sur le vert de la prairie courait parfois l’ombre d’un petit nuage.

Le dos appuyé à l’arbre devant lequel se tenait leur banc, le borgne berçait très lentement son hôte, puis il fredonna à voix basse une chanson de marin parmi ses préférées.

Il chuchota presque à l’oreille de Joshin.

Connaissez-vous, ma chère Joshin, la théorie du « moment parfait » ?..

Kal laisse planer un court silence.

Le moment parfait est celui qui, rien que par sa simplicité, ne pourrait être meilleur.
Certes, à chaque instant nous aimerions peut-être nous savoir plus appréciés, plus admirés, plus riches ou en meilleure santé.

Le moment parfait lui, n’a besoin de rien de plus pour « être ».

Il convient cependant de le reconnaître pour tel, de l’attraper au vol, et de se dire « je vis un moment parfait », au moins par l’esprit. Cela aide, je crois, à le savourer.

L’officier posa ses lèvres sur les cheveux de son capitaine, et les embrassa brièvement.

Je goûte maintenant, auprès de vous, un de ces rares et précieux moments parfaits.

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Insensiblement, tout naturellement, elle se retrouva dans les bras de son hôte, écoutant la chanson qu'il lui chantonnait à voix basse. Puis il lui parla du "moment parfait".
Elle ne connaissait pas l'expression, elle n'eut aucune honte à l'avouer. Mais elle en comprenait parfaitement le sens , car elle ressentait ce que ce moment avait de parfaitement "parfait", et le reconnaissait comme tel.
Un baiser léger voleta sur ses cheveux, et elle sourit doucement.

- Mon cher Kal, vous venez de me dire de bien belles choses, et une phrase surtout que je pourrais reprendre à mon compte: "je vis un moment parfait". J'ajouterai quelque chose, cependant, qui vous étonnera peut-être ou que vous ne comprendrez peut-être pas. Moi, j'ai juste envie de dire que je vis, ou plutôt que je revis, que de nouveau je me sens vivante et que c'est par la grâce de ce moment parfait. Je vous le dois, jamais je ne pourrai l'oublier.

Elle ne voulait pas penser à demain, ni se demander ce que l'avenir lui réserverait: elle voulait juste que ce moment parfait se prolonge, et elle savait qu'elle le garderait dans son souvenir comme un beau joyau.

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Ils restèrent ainsi un long moment, blottis à l'ombre des tilleuls.
D'aucuns craignent les silences dans une conversation. Cela n'avait jamais été le cas de Kalwynn.
Certes il existe de ces silences vides, quand l'on a rien à se dire, mais est-ce pire que de parler de la pluie ou du beau temps ?..
Et des silences "pleins", quand l'un, l'autre ou les deux interlocuteurs prennent le temps de réfléchir aux paroles échangées, prennent le temps de goûter un moment partagé.

Maladroitement sans doute, le borgne dût toutefois reprendre la parole.

Chère Joshin, vos paroles emplissent mon coeur de joie, et je suis comblé si je puis vous apporter ne serait-ce qu'une minuscule flamme de bonheur.
Toutefois, sur la question de vous sentir vivante, j'ignore si je joue un rôle quelconque là-dedans. Pour nous tous, vous n'avez jamais cessé d'irradier la vie.
Aristote nous convoquera bien assez vite, nous privant de vie... alors autant ne pas nous en priver nous-même.

Les lèvres de l'officier s'étirèrent en un pâle sourire, que Joshin ne pouvait voir.
Kal savait qu'il ne pouvait comprendre les souffrances endurées par la femme formidable qu'il tenait entre ses bras.
Néanmoins lui-même avait perdu bien des camarades, à défaut d'un amour.

Les nuages s'étaient entre-temps amoncelés, et un roulement de tonnerre gronda au loin.
Kalwynn s'agita doucement, redressant Joshin entre ses bras.

Nous devrions nous chercher un abri je crois, je crains bien que les nuées ne s'ouvrent sur nos têtes !

Le soldat se redressa de toute sa taille, courbant la tête sous les branches feuillues, et tendit une main à Joshin.